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Le cerveau, une merveille de la nature

 Serge Ginger

             Ceci est le résumé d'une conférence faite en 2010 par Serge Ginger Psychologue ; psychothérapeute formé en psychanalyse, psychodrame, Gestalt et EMDR Fondateur de l'École Parisienne de Gestalt (EPG) et de la Fédération internationale des Organismes de Formation à la Gestalt (FORGE) Professeur de neurosciences à la Sigmund Freud University (Paris) Secrétaire général de la Fédération Française de Psychothérapie et Psychanalyse (FF2P) Président de la Commission européenne d'accréditation des instituts de formation à la psychothérapie, de l'European Association for Psychotherapy (EAP).

 

Introduction

             Rassurez-vous : je vais essayer de partager avec vous les récentes découvertes des chercheurs scientifiques, mais cela en termes simples et accessibles à tous. D'ailleurs, je suis moi-même un psychothérapeute praticien, au contact quotidien avec la réalité de tous les jours, et non un chercheur de laboratoire.

             Teilhard de Chardin disait, il y a un siècle : " il existe trois infinis : l'infiniment grand, l'infiniment petit et l'infiniment complexe. A la fin de XXe siècle, on a entamé la domestication de l'infiniment grand, avec la conquête spatiale, celle de l'infiniment petit, avec la fission de l'atome et les nanotechnologies… et le programme du siècle à venir concerne maintenant l'infiniment complexe, c'est-à-dire le cerveau et la génétique.

             Plus récemment, Hubert Reeves confirme, de son côté, que le cerveau humain est, de loin, la structure la plus complexe de tout l'Univers.

             Depuis le lancement de la " décennie du cerveau " (1990-2000) par une proclamation du président des Etats-Unis (G. Bush), le 17 juillet 1990, les connaissances ont beaucoup évolué, notamment grâce aux nouvelles technologies d'imagerie médicale, en particulier l'IRM (l'imagerie par résonance magnétique) et la TEP (tomographie à émission de positons) - techniques que j'appellerai plus simplement le "scanner " - qui permet de voir fonctionner le cerveau en temps réel et au millimètre près.

             Je soulignerai au passage, les différences importantes de fonctionnement du cerveau des femmes et des hommes (à un niveau statistique, bien entendu, puisqu'il y a de nombreuses exceptions - ici même : on considère, en effet, que 20 % des hommes fonctionnent avec un cerveau de type " féminin ", et 10 % des femmes, avec un cerveau de type " masculin ").

 

Tout d'abord, quelques chiffres pour illustrer la complexité du cerveau

 

             Nous possédons, environ 100 milliards de neurones (soit le nombre d'étoiles de la Voie Lactée) et plusieurs millions de milliards de synapses dans le cerveau, soit 10 000 milliards de synapses par cm3 de cortex (chaque neurone peut être relié à plusieurs milliers d'autres). Pour les décompter, au rythme de une par seconde, il faudrait un million d'employés à plein temps… pendant 100 ans ! Les capacités de notre cerveau égalent un ordinateur de la surface de la France + la Belgique + la Suisse, sur une hauteur de 10 étages.

             Nous pourrions emmagasiner 125 000 milliards d'unités d'information (bits), soit le contenu des 100 millions de livres publiés dans le monde depuis l'origine de l'imprimerie.

             Les neurones se créent au rythme hallucinant de 300 000 à la minute, entre le 3e et le 7e mois de la grossesse. Chaque neurone mesure environ un millième de mm. Si on le grossissait à la dimension d'un grain de sable, on transporterait un camion de dix tonnes.

             Mais un neurone n'est pas comme un simple grain de sable : c'est une structure complexe de 400 000 macromolécules (la population de la ville de Toulouse). Chacune a une fonction définie : production d'énergie, distribution de nourriture et d'oxygène, police et douane, élimination des déchets, etc. (soit tous les services d'une grande ville). Chaque neurone est constitué d'un corps cellulaire, d'un axone, de dendrites. Le corps cellulaire comprend une membrane (sa peau), du cytoplasme, un noyau… La membrane comporte six couches de cellules qui filtrent à chaque instant toutes les entrées et les sorties (ions potassium, sodium, etc.). Le noyau comprend les chromosomes, filaments où est inscrit notre patrimoine génétique (30 000 gènes de notre ADN - unique - dont 70 % concernent notre cerveau). Ce filament, dévidé grandeur nature, s'étendrait jusqu'à la lune. Il comprend une information, codée en 4 lettres, correspondant au contenu de 3 000 livres de 300 pages (une pile de 20 étages… où " tout est écrit ") = notre " mode d'emploi " personnel, enregistré dans chacune de nos 60 000 milliards de cellules.

             Chacun de ces " livres " est contrôlé avec précision : s'il y a une faute de frappe d'une seule lettre dans un ouvrage de 300 page, tout le livre est normalement rejeté (fausse-couche spontanée). La Nature a horreur des erreurs !

             Ces neurones sont donnés à la naissance. Il ne s'en crée que très peu dans certaines régions comme l'hippocampe (découverte révolutionnaire de ces cellules souches, en 1998). En revanche, il en meurt de 50 à 100 000 tous les jours (mais à 80 ans, il en reste cependant encore 70 %). Cet " élagage " commence in utero - où sont éliminés de 10 à 70 % de neurones inutiles (" apoptose " ou suicide neuronal programmé).

             Tout ce qui n'est pas utilisé s'atrophie et meurt. Le cerveau " s'use quand on ne s'en sert pas " ! L'apprentissage est une sélection ; l'oubli est indispensable pour éviter la saturation. Cf. Google qui vient d'indexer 1 000 milliards de pages (= un dictionnaire épais de …35 000 km, soit 500 millions de Petits Larousses illustrés côte à côte, qui feraient le tour de la Terre). T. de Chardin avait prédit il y a 50 ans la " noosphère " des idées qui entoure la biosphère, soit le " cyberespace " d'aujourd'hui.

 

Freud, quant à lui, écrivait, dès 1920 :

"              La biologie est vraiment un domaine aux possibilités illimitées ; nous devons nous attendre à recevoir d'elle les lumières les plus surprenantes, et nous ne pouvons pas deviner quelles réponses elle donnera dans quelques décennies aux questions que nous lui posons. Il s'agit peut-être de réponses telles qu'elles feront s'écrouler tout l'édifice artificiel de nos hypothèses ! " - écrivait Freud, en 1920

 " Quelques décennies " ont passé : où en sommes-nous aujourd'hui ?

 

             Aujourd'hui, nous assistons au développement progressif de nouvelles disciplines… aux États-Unis et peu à peu, en France : la neuropsychanalyse et les neurosciences sociales .

 
 

             Je vais maintenant entrer un peu plus dans le détail des recherches contemporaines, et je vais citer quelques exemples concrets, illustrant l'intérêt de l'étude des neurosciences, non seulement pour une exploitation optimale des techniques neurochirurgicales ou psychothérapeutiques, mais aussi pour notre vie quotidienne.
             Ces recherches ont révélé de nombreux aspects du fonctionnement du cerveau qui étaient peu connus auparavant, bien que souvent pressentis intuitivement par plusieurs précurseurs, tels que Freud, Ferenczi, Reich ou Perls, le fondateur de la Gestalt-thérapie - qui propose une approche globale, holistique, intégrant les cinq dimensions principales de l'être humain : physique, émotionnelle, cognitive, sociale et spirituelle (que j'ai symbolisée par un pentagramme, une étoile à cinq branches).
             Je voudrais souligner l'intérêt des approches dites " psychocorporelles ", par rapport aux approches traditionnelles, essentiellement verbales, comme la psychanalyse.

             En effet, tout contact ou mouvement du corps mobilise l'hémisphère droit du cerveau, lequel est directement relié aux zones limbiques profondes du cerveau émotionnel - par " la voie perforante " - liaison synaptique originale qui n'a pas son équivalent dans le cerveau gauche, verbal et rationnel.

             Toute émotion est accompagnée de production de neurotransmetteurs spécifiques (on en connaît aujourd'hui près d'une centaine) qui modulent l'humeur et la pensée. La plupart de ces neurotransmetteurs circulent à l'intérieur du cerveau et du corps de chacun, mais certains d'entre eux diffusent dans l'environnement de l'organisme et " touchent " ainsi l'interlocuteur qui se trouve à proximité - que ce soit le partenaire de le vie quotidienne ou le psychothérapeute : je veux parler des fameuses phéromones - qui constituent notre réel " 6e sens ", le sens chimique, un des éléments de ce qu'on appelle habituellement l'intuition.

             Notre 6e organe des sens, l'OVN (l'organe voméro-nasal) est invisible à l'œil nu et situé dans la profondeur du nez ; il est chargé de capter ces phéromones (qui traduisent notre humeur profonde). À chacune des six émotions de base (joie, tristesse, peur, surprise, colère, dégoût), correspond une phéromone spécifique. L'OVN est totalement distinct des voies olfactives, n'a aucune odeur, et n'a aucune liaison directe avec les zones corticales de notre cerveau conscient. Ses informations sont donc totalement inconscientes et touchent directement notre sensibilité profonde, non verbalisable. Lorsque je dis " Cette personne, je ne peux pas la sentir ! " ou, au contraire, " cette autre personne m'est d'emblée très sympathique ", je ne sais généralement pas expliciter pourquoi : nous avons tout simplement " des atomes crochus " !

Je soulignerai aussi l'importance de la verbalisation a posteriori des affects ressentis, qui seule permet l'enregistrement, " l'engrammation " cérébrale des expériences vécues, et donc leur exploitation ultérieure.

             C'est un peu comme lorsque nous avons terminé un travail sur l'écran de notre ordinateur : pour en conserver la trace et pouvoir le retrouver et le poursuivre, il est indispensable de donner un titre verbal au document. Le titrage n'est pas le travail, mais un simple repère. De même, l'échange verbal n'est pas en soi un travail thérapeutique, mais un repérage.

             Bien entendu, la parole peut déclancher une émotion, et donc des modifications neuronales (poussée de dendrites et " buissonnement neuronal ", nouvelles liaisons synaptiques, production de neurotransmetteurs ou hormones…). Dans ce cas, on peut dire que " Le Verbe s'est fait chair " : la parole s'est incarnée et a produit un effet, potentiellement durable. Mais la plupart du temps, dans l'expérience quotidienne, le processus est inverse : l'émotion vient d'abord, spontanément ; elle n'est conscientisée et verbalisée que dans l'après-coup.

 

             En fait, dans notre fonctionnement, tout est circulaire et systémique et les interrelations biologiques, psychologiques et sociales sont permanentes, et fonctionnent dans les deux sens : l'appétit me fait saliver… et la salive aiguise mon appétit ; " lorsque je pense à Fernande, je b… ", dit le poète… et réciproquement !

             Une caresse ou un massage stimule la production d'ocytocine… et l'ocytocine développe mon besoin d'attachement, de tendresse, de compréhension, de confiance et d'amour.

             On a récemment découvert que la myélinisation des circuits de liaison orbitaux-frontaux (isolation des circuits par une gaine de myéline, comme du " chatterton ") qui permet la transmission de plus en plus sûre et rapide de l'information (de 0,5 à 120 mètres à la seconde, entre le bébé et l'adolescent) et l'intégration des informations sur l'état interne de l'organisme (notre équilibre physiologique, nos émotions, nos pensées) et sur son environnement, et donc une prise de décision adaptée ;

cette myélinisation n'est terminée, en moyenne, qu'aux environs de 25 ans, bien plus tard qu'on le supposait. Cela explique les comportements parfois impulsifs des adolescents, dont les émotions (limbiques) ne sont pas encore suffisamment contrôlées par le niveau corticofrontal (conscient et volontaire).

             On rencontre le même type d'immaturité ou de dysfonctionnement neuronal chez les autistes, et même chez les personnalités limites (borderline) : leur amygdale est hypersensible à tout stress, tandis que leurs liaisons frontales sont, au contraire, inhibées - ne permettant pas une gestion saine de l'humeur et des passages à l'acte.

 

La psychothérapie est-elle une " chimiothérapie " qui s'ignore ?

 

             Les récents travaux des neurosciences permettent de réaliser qu'en fait, tout apprentissage (ou toute psychothérapie) agit directement sur les circuits synaptiques et modifie parallèlement la biochimie interne du cerveau : la production des hormones et des neurotransmetteurs (tout spécialement la dopamine, la sérotonine, l'adrénaline, la noradrénaline, la mélatonine, les endorphines, la testostérone, les œstrogènes…).

 

Trois étapes historiques

 

          -Il y a quelques années encore, on opposait volontiers la chimiothérapie et la psychothérapie : les psychiatres traditionnels souriaient, avec condescendance, devant les affirmations des psychanalystes et des psychothérapeutes, et considéraient leurs méthodes comme des " distractions mondaines à la mode ". Ils ne faisaient confiance qu'aux médicaments, dûment contrôlés par les laboratoires, après des tests en " double-aveugle " (ni le prescripteur, ni le patient ne savent quel produit est utilisé), les comparant à des placebos.

             Après la révolution des antibiotiques en médecine infectieuse, vint la révolution des neuroleptiques en médecine mentale : enfin, on met au point une série de molécules qui agissent directement au niveau du cerveau, et modifient le comportement (tranquillisants, antidépresseurs, stimulants, antidélirants ou neuroleptiques). En 1952, Henri Laborit introduit un nouveau produit psychotrope (qui se dirige vers le psychisme), le largactil, qui permet la suppression progressive de la camisole de force dans les hôpitaux psychiatriques, la remplaçant par ce qu'on a appelé (non sans quelque exagération) " la camisole chimique ".

             On sait que la France détient le triste record du monde d'utilisation des psychotropes (on en consomme 3 fois plus que nos pays voisins : l'Allemagne, l'Angleterre ou l'Italie) : le Temesta est devenu " l'aspirine de la psyché ", et un million et demi de nos concitoyens consomment aujourd'hui du Prozac. Ces nouveaux médicaments, pour efficaces qu'ils soient, ne sont pas dénués d'effets secondaires regrettables : somnolence, perte d'initiative, trous de mémoire, baisse sensible de la libido… voire même suicide - notamment en cas d'interruption inopinée d'un traitement chez un jeune (dont les circuits frontaux de contrôle sont encore immatures).

             - Dans un second temps, au lieu d'opposer chimiothérapie et psychothérapie, on les a associées : la psychothérapie permet en effet, de prolonger et d'élargir l'effet d'un traitement médicamenteux et d'en diminuer progressivement le dosage ; tandis qu'à l'inverse, la chimiothérapie permet de préparer, d'accompagner ou de prolonger une approche psychologique, en apaisant l'angoisse ou en coupant le délire.

             - Mais voici que nous entrons aujourd'hui dans une troisième phase : non plus opposition, ni simple complémentarité, mais identité d'un processus à deux faces : on prend conscience que, finalement, certaines psychothérapies sont des chimiothérapies qui s'ignorent. En effet, leur action entraîne des modifications neurophysiologiques et biochimiques, rapides et durables (on a " réamorcé la pompe "). Avec l'avantage majeur qu'elles sont strictement personnalisées et dosées spontanément par l'organisme - et cela, parfois au milliardième de milligramme près, tout comme notre organisme surveille sans cesse le taux du sucre dans le sang, celui des vitamines ou des Oméga 3, ou encore du fer ou du zinc (sans lequel nous n'aurions pas d'odorat).

 

Une biochimie subtile et personnalisée

 

             Ainsi, par exemple, une injection d'un milliardième de gramme d'ocytocine (l'hormone qui fait monter le lait, et qu'on a baptisée l'hormone de l'attachement - voire de l'amour) suffit à induire aussitôt un comportement maternel chez une femelle vierge (rate ou brebis) . On sait aujourd'hui que cette ocytocine est produite non seulement lors de l'accouchement, mais aussi à chaque contact physique, lors d'un massage, pendant la caresse d'un bébé, pendant tout échange de tendresse, ou encore à l'occasion d'une relation amoureuse.

             Aucune administration d'un médicament externe ne peut prétendre s'adapter aux variations subtiles et permanentes des dosages hormonaux de chaque patient : chaque repas, mais aussi chaque émotion, modifie cet équilibre. Rappelons, à titre d'exemple, que tout succès (amoureux, sportif, social ou intellectuel) peut doubler instantanément le taux de testostérone dans le sang ; quant à un orgasme, il multiplie… par quatre le taux de la testostérone et des endorphines ! Cette poussée subite de testostérone explique le comportement - somme toute surprenant - des joueurs de football qui viennent de marquer un but, et qui se " sautent " dessus, dans un élan érotique spontané, où encore celui des vainqueurs de Formule 1 automobile qui, dans leur excitation sexuelle, ouvrent une bouteille de Champagne… pour " l'éjaculer ", au lieu de la boire !

             Rappelons-nous que la même testostérone gère à la fois l'agressivité, mais aussi le désir sexuel - y compris, chez la femme, bien sûr. C'est donc l'hormone de la conquête, aux deux sens du terme (conquête amoureuse et conquête militaire). Ces deux pulsions fondamentales de vie - et de jeunesse - (survie de l'individu par la défense agressive du territoire, et survie de l'espèce, par la copulation) sont en fait très liées ; elles se côtoient d'ailleurs dans l'hypothalamus, séparées simplement par une zone de quelques millimètres… entre la zone de l'agressivité et celle de la sexualité : la zone de gestion du plaisir !

 

Hérédité et acquis (génétique et plasticité)

 

             Il en est de même de l'éternel faux problème de l'inné et de l'acquis.

Est-il possible de développer des aptitudes chez nous-mêmes ou chez nos enfants, ou de modifier des comportements ou des ressentis, si tout est prédéterminé par nos dispositions héréditaires ?

             Malgré toutes les idéologies démocratiques et fort sympathiques, il n'est pas contestable que nous ne naissons pas égaux : il y a des grands et des petits, des blonds et des bruns, des Noirs et des Blancs, tout comme il y a des personnes plus intelligentes et d'autres moins douées, que ce soit pour les mathématiques, pour le sport ou la musique. Alors, tout serait-il joué à la naissance ? Heureusement, non ! Nous ne sommes ni prisonniers de nos gènes… ni libres pour autant !

             En chiffres très arrondis, les chercheurs considèrent aujourd'hui que notre caractère peut se répartir en trois tiers environ. Il apparaît :

o pour 1/3 héréditaire : chromosomes du noyau de la cellule (notre ADN, hérité directement de nos parents et ancêtres) ;

o pour 1/3 acquis : bain culturel, éducation, exercice ou entraînement, circonstances fortuites… ou psychothérapie ;

o pour 1/3 congénital, c'est-à-dire acquis pendant la vie intra-utérine ; ainsi, par exemple, l'embryon est féminin pendant les premiers jours , et la masculinité est une lente conquête, hormonale puis éducative et sociale. En réalité, la fille n'est pas un garçon qui a perdu son pénis mais le garçon est une fille qui a gagné un pénis. (L'envie de pénis est une hypothèse non vérifiée par l'expérience : ainsi, chez les transsexuels, on trouve aujourd'hui… cinq fois plus d'hommes désirant devenir une femme, que de femmes voulant devenir un homme !).

 

             Les parts héréditaire et congénitale semblent donc importantes : ainsi, par exemple, chez les vrais jumeaux garçons (homozygotes), si l'un est homosexuel, l'autre l'est aussi dans 60 % des cas ; chez les faux jumeaux (hétérozygotes), on ne le constate que dans 30 % des cas, soit deux fois moins souvent, et dans 6 % seulement de la population générale.

 

             Pour de nombreuses aptitudes ou prédispositions - telles que l'intelligence, le don pour la musique, le sport, et même l'optimisme - on retrouve ces trois tiers (héréditaire, acquis in utero, acquis pendant la vie), dans des proportions légèrement variables. Ainsi face à un même événement, chacun voit " le même verre à moitié vide ou à moitié plein "…

             De toute façon, il ne s'agit que de prédispositions qui peuvent être soit développées, soit inhibées par l'éducation (ou par la psychothérapie) - lesquelles favorisent ou neutralisent l'expression des gènes sous forme de protéines (comme l'a démontré Eric Kandel - professeur à l'université de New York, qui poursuit ses recherches à 80 ans… comme moi ! - et vient d'obtenir le Prix Nobel, en l'an 2000). L'hérédité n'est donc pas une " fatalité " !

             Il convient de souligner, au passage, qu'un accroissement de 20 % seulement transformerait un homme normal (1,85 m) en géant (2,20 m), ou encore un bon coureur, en véritable champion. La psychothérapie peut, de même, transformer un gros dépressif… en dépressif léger !… voire en homme heureux !

             Cette plasticité fondamentale du cerveau se maintient tout au long de la vie, jusqu'à un âge avancé : ainsi, on vient encore de confirmer récemment par des techniques d'imagerie cérébrale que la surface du cortex représentant la main gauche s'élargit régulièrement chez les violonistes, pendant que les aires d'orientation spatiale vont jusqu'à doubler chez les chauffeurs de taxi londoniens (Londres est célèbre pour la complexité de son trafic). Mais la plasticité (apprentissage) est maximale à certaines périodes clé : in utero, de 12 à 26 mois, à l'adolescence (de 8 à 12 ans surtout)....

 

 Trois ultimes remarques

 

             o Le nombre de femmes qui consultent (et aussi qui offrent leurs services en psychothérapie) est environ 3 fois supérieur à celui des hommes (qui hésitent beaucoup à livrer leur ressenti) ;

 

             o Notons l'intérêt de stimuler les malades : ils guérissent plus vite lorsqu'ils sont près d'une fenêtre, (ouverte sur le monde). De même, il importe de stimuler les personnes âgées (vous avez bien compris qu'une retraite passive induit un vieillissement rapide) ;

 

             o La mode des " nouveaux pères " - qui langent et caressent leur bébé - les amène à produire beaucoup plus d'ocytocine (ce qui les rend plus doux et sympathiques… mais cela au détriment de leur agressivité et de leur production de testostérone, qui peut diminuer de 33 % !). On assiste d'ailleurs aujourd'hui à une rapide démasculinisation des hommes, sous l'action conjuguée de facteurs biologiques, écologiques, culturels et sociaux. De plus, la pollution chimique, et notamment l'invasion des matières plastiques, stimulent les œstrogènes . Au total, la production de spermatozoïdes a chuté de moitié en 30 ans !

 

 Brève bibliographie francophone

 o Balthazart J. Biologie de l'homosexualité (on naît homosexuel…). Mardaga. 23010 (300 p.)

o Cyrulnik B. Les nourritures affectives. Paris. Odile Jacob. 1993 (246 p)

o Cyrulnik B. De chair et d'âme. Paris. Odile Jacob. 2006 (260 p)

o Damasio A. L'erreur de Descartes. Paris. Odile Jacob. 1995 (370 p)

o Dodge N. Les étonnants pouvoirs de transformation du cerveau. 2010 (626 p.)

o Durden-Smith & Desimone Le sexe et le cerveau. Montréal. éd. La Presse. 1985 (270 p)

o Ginger S. La Gestalt, l'art du contact. Paris. Marabout. 1995. 9e éd. 2007 (288 p). Trad. en 14 langues

o Ginger S. & A. Guide pratique du psychothérapeute humaniste, Dunod, Paris, 2008 (256 p).

o Jouvet M. Le sommeil et le rêve. Paris. Odile Jacob. 1992 (220 p) et coll. Poche Points

o Kimura D. Cerveau d'homme, cerveau de femme ? Paris. Odile Jacob. 2000 (250 p.)

o Kolb B. & Whishaw Q. Cerveau et comportement. Bruxelles, De Boeck, 2008 (1000 p)

o Le Vay S. Le cerveau a-t-il un sexe ? Paris. Nouvelle Biblioth. scientifique Flammarion. 1994 (230 p)

o Perls F. Manuel de Gestalt-thérapie, ESF, Paris, 2003 (128 p.) ; 2e édition : 2005.

o Rossi E. L. Psychobiologie de la guérison. Paris. Hommes et perspectives. 1994. (450 p)

o Vidal C. Cerveau, sexe et pouvoir. Paris, Belin, 2005 (112 p)

o Vincent J.D. Biologie des passions. Paris. Odile Jacob. 1986 (352 p)

o Vincent J.D. Voyage extraordinaire au centre du cerveau. Paris. Odile Jacob. 2007 (460 p)

o Vincent L. Où est passé l'amour ? Paris. Odile Jacob. 2007 (204 p)

o Zarifian E. Le prix du bien-être. Paris. Odile Jacob. 1996 (280 p)

Voir égalemn: 

Psychanalyse, neurosciences et neuropsychanalyse

 

Site web :http://sergeginger.net/

 

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Commentaire

Réaction
<<Ce qui est incompréhensible c’est d’avoir un potentiel neuronal si développé (des milliards de cellules interconnectées, àen faire pâlir de jalousie les ordinateurs les plus sophistiqués, etc...)et d’être incapable de se souvenir d’un n° de téléphone à 10 chiffres, de faire mentalement une division fastoche ou de mettre 3 jours à apprendre une petite récitation (quand on y arrive !)!!! Quel est le sens d’une telle disproportion ??? C’est un mystère pour moi. Pourquoi la nature a-t-elle mis a disposition des hommes un cerveau aussi perfectionné, sans lui donner les clés pour en tirer bénéfice, pour savoir l’exploiter, pour l’utiser dans sa vie quotidienne ou professionnelle(du moins dans une infime proportion)? >>

<<c’est intéressant>>J.R

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