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Violence à l'école et École de la violence

Jacques Salomé

             C'est devenu une banalité que de le rappeler : il y a aujourd'hui beaucoup de violence à l'école. Or sans rien retirer de toute la violence qu'exercent certains jeunes il m'a paru intéressant de tenter de montrer, combien aussi le monde actuel, celui des adultes, le système social et scolaire pouvaient faire violence aux enfants et engranger en eux frustrations, désarrois et réactions défensives. Ainsi il ne s'agira plus de chercher des coupables mais de comprendre comment nous sommes tous pris dans un même système qu'il nous est nécessaire de faire évoluer.

             Nous exerçons beaucoup de violences… dans la plus parfaite des inconsciences car nous vivons justement dans ce système d'habitudes que nous avons reçues.

             Dans la vie scolaire cela se traduit par quelques pratiques naturelles, spontanées qui ne font pas souvent l'objet, d'une remise en cause, parce que c'est comme cela que nous, enseignants, nous avons vécu à l'école; comme cela qu'on nous forme encore souvent, alors que ces pratiques contribuent à la violence endémique exercée sur les enfants. Je voudrais en rappeler quelques unes :

La gestion de ses propres besoins

             Quand un enseignant ouvert se définit comme porteur de savoirs et de savoir faire et qu'il s'offre de partager généreusement tout cela avec les élèves, sa méthodologie personnelle est qu'il est en droit de réclamer silence, attention, disponibilité et participation de la part de ces élèves.

             Nous pourrions dire que son besoin attend satisfaction, par une réponse des élèves, en conformité avec ses attentes.

             En face de lui, cependant, mille autres attentes potentielles sont en concurrence avec le besoin de silence, de disponibilité, d'attention de l'adulte. D'autres besoins, tels ceux de bouger, de parler, de rêver, d'associer, de jouer, de s'évader… cohabitent dans une salle de classe.

             La relation pédagogique, en ce sens est fondamentalement une relation de conflits de besoins. Mais ces conflits vont la plupart du temps être niés, et réduits à s'ajuster sur l'attente du professeur.

             La structure scolaire, développe un ensemble de règles qui visent à développer, imposer globalement un ajustement du comportement des enfants aux besoins considérés comme prioritaires de l'enseignant.

             Celui-ci gardant l'illusion, que les besoins des enfants seront satisfaits ailleurs, dans un autre espace, un autre temps ou dans d'autres activités.

 

             Aujourd'hui, non seulement, les enfants témoignent plus ouvertement de leurs besoins, mais encore les imposent-ils sans souci du lieu, du temps ou même des possibles de la réalité scolaire, avec une prise de pouvoir le plus souvent chaotique qu'il serait naïf de confondre avec une liberté d'expression.

 

Le système question-réponse

             Dans ce système structuré par de solides habitudes, celui qui pose une question, attend une réponse qui aille dans le sens de ses attentes, de ce qu'il sait, de ce qu'il veut.

             Quand un enseignant pose une question, il attend que l'élève donne la bonne réponse, celle du livre ou du savoir qu'il possède, lui, et vérifie chez l'enfant.

             Certains pédagogues savent l'importance d'accueillir et de s'appuyer sur la réponse de l'enfant aussi éloignée soit-elle de ses propres connaissances pour la relier à un savoir cohérent.

             Le dépassement du système question-réponse quand il est remplacé par une invitation à partager, échanger, témoigner renforce la communication relationnelle qui est à la base d'une participation plus ouverte chez tous les membres d'une classe.

 

Les rapports d'évaluation

             Nous voyons plus facilement dans le comportement des enfants, ce qui nous blesse, nous dérange ou nous irrite que le positif de leur conduite. De même nous pouvons être portés à mettre en avant dans nos remarques les erreurs plutôt que ce qui est exact.

             J'aurais souhaité rencontrer un enseignant qui puisse me confirmer, que dans une dictée de quatre vingts mots j'en avais écrit soixante quinze de justes. Le statut même de l'erreur peut être transformé en "occasion de compréhension et de réussite" ou au contraire de "faute" . La pédagogie de la réussite est plus efficace que la pédagogie de l'échec.

             La confiance en soi se construit sur la confirmation des ressources et des réussites plus que sur la mise en évidence des manques et des insuffisances, ou sur la dévalorisation trop fréquente de l'image de soi.

 

Le principe d'implication personnelle

             Arrêter de parler sur l'autre pour accepter de parler à l'autre supposera le risque d'apprendre à parler de soi, de pouvoir dire son ressenti, sa perception ou sa position.

             Plutôt que d'accuser un enfant de n'avoir pas fait, il est plus important de dire sa déception ou de confirmer son attente, de renouveler sa demande.

             Quand nous parlons sur l'autre nous n'existons pas pour lui et ce dernier enfermé dans notre discours, n'a pas non plus le sentiment d'exister.

 

Le refus de la violence verbale ou physique pour dépasser un conflit

             Il y a incontestablement un retour parfois de la violence dans certains établissements scolaires. Sévices moraux par des disqualifications verbales, des jugements de valeur et parfois même sévices physiques par des coups, des punitions corporelles.

              Il faut se rappeler que les blessures de l'enfance les plus profondes, celles qui vont s'inscrire dans la dynamique intime et structurer par la suite la relation au monde d'un enfant se créent à partir de sentiments liés à l'expérience vécue dans la rencontre avec l'humiliation, l'injustice, l'impuissance et la disqualification.

             Le milieu scolaire est fertile en situations où l'injustice, plus par aveuglement et laxisme que par volonté délibérée, les humiliations petites et plus grandes ou encore le renvoi de l'enfant à ses insuffisances vont dominer.

             C'est pourquoi les lieux où l'expression, la médiation possible de ces différentes situations qui vont inévitablement surgir, peuvent se clarifier et se dépasser sans trop de souffrance sont utiles à créer.

             Les conseillers d'éducation, certains professeurs délégués qui par leur sensibilité plus ouverte sont plus disponibles, interviennent la plupart du temps en situation de crise ou d'incidents majeurs. C'est pourquoi il est utile de développer le temps et l'espace de régulation où peuvent se rencontrer les trois niveaux interdépendants de toute situation relationnelle :

-la dimension fonctionnelle (transmissions et acquisitions de savoirs et de savoir faire)

-la dimension interpersonnelle (apprendre à demander, donner, recevoir et refuser)

-la dimension intrapersonnelle (savoir-créer, savoir-être et savoir-devenir).

             Des formations à la médiation sont à encourager car elles constituent des outils extrêmement fiables pour régulariser et dépasser les tensions, malentendus et violences qui circulent entre tous les protagonistes du système scolaire.

             Je n'ai fait qu'effleurer quelques unes des violences possibles de la cohabitation scolaire, aujourd'hui viennent s'ajouter les pollutions et les intrusions du monde extérieur : drogues, passages à l'acte venant de l'extérieur, l'école n'étant plus un sanctuaire protégé.

             Avec les dysfonctionnements familiaux, la perte des repères et des valeurs, le vide relationnel de certains quartiers, l'insécurité, le désespoir tout cela contribue à fragiliser l'entrée dans la vie de beaucoup d'enfants.

             Peut-être qu'un jour un enseignement de la communication relationnelle comme une matière à part entière ouvrira les portes à moins de détresse pour les enfants comme pour les enseignants ! C'est l'utopie que je porte.

Pour approfondir:

Des livres:
Des sites:

Salomé(J.).Charte de vie relationnelle à l'école.Pour mieux communiquer à l'école. Ed. Albin Michel (1995)

Salomé(J.).Minuscules aperçus sur la difficulté d'enseigner. Ed. ENFA Toulouse

Voir aussi: Livres sur la violence

 

Site de Jacques Salomé

Violence et formation des enseignants

le site de Jacques Salomé

 

Voir la vidéo de Jacques Salomé:

http://www.youtube.com/watch?v=AengfwIvxCY&feature=related

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Réactions

<

<Chaque enfant est en droit d’exiger des adultes qui l’accompagnent parent tout d’abord puis enseignant ensuite aussi bien une confiance qu’une attention quand à la notion de respect d’écoute d’équité...Il m’a été donné de constater que dès l’instant où l’enfant rentre dans le système scolaire non seulement sa crainte et ses angoisses de l’existence apparaissent mais en plus il y a la violence ordinaire exercée par le corps enseignant qui se croit tout puissant tout supérieur >>

<<J epense que ce site est très bien =) En ce moment, en ECJS (je suis une élève de l'enseignement général secondaire ) Nous trvaillons sur la violence à l'école. je trouve que ce site est très bien expliqué.>>

 
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